L’écriture manuscrite au cycle 3 (2)

Mon fils est en CM1. Il écrit très lentement et souvent il rentre à la maison sans avoir fini de copier ce que son maître a écrit au tableau. Cela m’inquiète surtout pour l’entrée en 6ème.

Je vous disais récemment qu’il peut y a voir deux causes  à sa lenteur :

  1. Il n’aime pas écrire
  2. Il ne sait pas copier de manière efficace

Aujourd’hui nous allons nous intéresser au

Deuxième cas : Il ne sait pas copier de manière efficace

C’est une difficulté beaucoup plus fréquente qu’on ne le pense pour plusieurs raisons :

  1. Nous avons une mauvaise représentation de ce qu’est l’exercice de copie, nous pensons à tort qu’il s’agit d’une activité quasi automatique qui ne sollicite pas les facultés intellectuelles ;
  2. Comme cette fausse représentation est partagée par beaucoup d’enseignants, rares sont les pédagogues qui apprennent aux élèves à copier ;
  3. En plus des difficultés propres à la copie, nos enfants doivent gérer celles liées à leur faible pratique de l’écriture.

 

 Quelques mots sur la copie

Outre des compétences d’écriture sur lesquelles je ne reviens pas, la copie nécessite d’avoir développé des compétences variées :

1.Les compétences de lecture : il faut savoir déchiffrer et comprendre ce qu’on lit.

Pour vous en convaincre, je vous propose un petit exercice. Essayez de copier :

  • des noms propres issus d’une langue très différente de la nôtre. Je choisis les personnages d’un roman de Dostoïevski :

Nicolas Vselodovitch Stavroguine et  Pitor Stepanovitch Verkhovenski,

  • une phrase d’un texte écrit dans une langue que vous ne parlez pas. Le début d’un article sur un roman de Thomas Mann :

Gustav von Aschenbach ist ein berühmter deutscher Dichter, der sehr auf Zucht und Vernunft bedacht ist Bos rapirtent dun prature miloustique.

  • une suite de mots qui pourraient être français mais qui n’ont pas de sens parce qu’ils n’existent pas :

Bos rapirtent dun prature miloustique.

Exercice vain pensez-vous ? Non, car cela vous vous fait vivre la situation à laquelle se trouve confronté un enfant lorsqu’il doit copier un texte qu’il ne comprend pas.

2.Des compétences d’observation : avant de copier un texte, on doit être capable de l’observer pour repérer les groupes de souffle, la ponctuation, les particularités orthographiques qu’elles soient relatives à des mots isolés ou à des accords grammaticaux.

Pour vous montrer le travail à effectuer intuitivement, je prends un résumé d’histoire dans un manuel de Cours Moyen

La Révolution industrielle

L’utilisation des machines a permis d’accroître la production et de diminuer les coûts. Les petits ateliers artisanaux ont presque disparu au profit des usines. L’industrialisation a commencé au XVIII° siècle et s’est accélérée au XIX° siècle : c’est ce qu’on appelle la « Révolution industrielle »

Un observateur efficace va remarquer :

a) Les groupes de souffle que je sépare par des traits obliques: L’utilisation des machines/ a permis/ d’accroître la production /et de diminuer les coûts./ Les petits ateliers artisanaux /ont presque disparu/ au profit des usines./ L’industrialisation a commencé au XVIII° siècle/ et s’est accélérée au XIX° siècle :/ c’est ce qu’on appelle/ la « Révolution industrielle »/

b) La ponctuation. Deux difficultés minimes : la majuscule à Révolution et les guillemets ; ces deux éléments marquent le caractère officiel de l’expression « Révolution industrielle »

c) Les particularités orthographiques. Elles sont multiples dans ce court texte : deux accents circonflexes, des participes passés (permis avec un s muet, disparu et commencé invariables, accélérée accordé avec le sujet), le verbe appeler avec deux l, des chiffres romains.

Soyons honnêtes, personne ne remarquera tous ces indices mais ils donnent une idée de la difficulté de l’exercice pour un enfant de 10 à 12 ans.

3.Des compétences de mémorisation. Il ne s’agit pas d’apprendre le texte par cœur mais de le mémoriser par morceaux au fur et à mesure.

En cycle 3, un élève doit pouvoir retenir les mots lus et leur orthographe par groupe de souffle sauf quand il est confronté à des mots ou des structures de phrase qu’il ne connaît pas ou qui présentent des difficultés particulières.

Ici il est évident qu’un enfant retiendra plus facilement le premier groupe de souffle (L’utilisation des machines) que le troisième (d’accroître la production) ou le neuvième (et s’est accélérée au XIX° siècle).

Ce travail de mémorisation est essentiel, il va permettre à l’enfant de ne pas s’arrêter trop souvent pour revenir vers le texte et de copier plus vite. Celui qui mémorise le texte par groupe de souffle s’arrêtera une quinzaine de fois, celui qui copie mot à mot plus de quarante fois.

Comment aider votre enfant qui copie trop lentement ?

Il faut d’abord que vous l’observiez dans un moment où il copie.

  • Il écrit trop lentement : c’est souvent lié à un manque d’entrainement (voir la partie 1 de ce chapitre) mais assurez-vous qu’il n’a pas de problème de vue. Un enfant qui y voit mal éprouve de la peine à observer un texte et à se repérer dans les lignes du cahier. Ses efforts et hésitations ralentissent son écriture.
  • Il s’arrête très souvent – après chaque mot, voire à l’intérieur de beaucoup de mots – pour regarder le texte à copier. Cela peut provenir :

d’un manque de confiance en soi : il a toujours peur de se tromper. Dans ce cas, cela relève plus d’une attitude éducative globale que de conseils pédagogiques. N’hésitez pas toutefois à en parler avec son enseignant.

-de difficultés d’observation ou de mémorisation. Votre enfant regarde le texte de manière désordonnée, sans vraiment chercher à le comprendre et il retient mal ce qu’il voit.

Voici quelques pistes

a) pour l’amener à organiser son observation et à mieux mémoriser ce qu’il lit.

  1. Lire le texte avec lui et s’assurer qu’il en comprend le sens général (Dans quelle matière travailles-tu ? Est-ce un énoncé de mathématiques, un résumé d’histoire, une poésie ? De quoi parle ce texte ?)
  2. Lui faire lire le texte à haute voix pour l’aider à remarquer les groupes de souffle
  3. Noter avec lui quelques aspects liés à l’orthographe, des accords au sein d’un groupe, des mots à double consonne ou lettre muette

b) pour l’amener à copier plus efficacement, je vous propose le procédé suivant.

1.Vous cachez le texte

copie-phase-2-4-6

2.Vous dévoilez le premier groupe de souffle. Votre enfant l’observe.

copie-phase-3

3.Vous le cachez, votre enfant doit l’écrire.

copie-phase-2-4-6

4.Vous continuez avec le deuxième groupe de souffle

copie-phase-5

…et ce jusqu’à la fin du texte.

Attention !

  • Avant de commencer, il faut expliquer à votre enfant le dispositif et sa raison d’être:« Je vais te mettre en difficulté pour que tu apprennes à copier plus vite ».
  • Si vous sentez qu’il se décourage ou que c’est vraiment trop difficile pour lui, gardez le dispositif mais procédez mot à mot. Surtout n’hésitez pas à le féliciter quand il parvient à écrire plusieurs mots sans vous demander d’enlever le cache.

Si vous faites cet exercice deux fois par semaine pendant un mois, votre enfant se créera un automatisme et n’aura plus besoin de cache pour organiser son observation. Vous constaterez des progrès rapides.